C’est acquis, les sites de collectivités ne devraient plus être conçus comme des vitrines institutionnelles, mais bien en fonction des usages constatés. L’expérience utilisateur (ou « UX ») et le recentrage sur les attentes des internautes sont désormais des voies incontournables. Pourquoi, alors, les discours de marketing territorial sont-ils encore construits sur ce que les territoires veulent dire et non sur ce que leurs cibles recherchent ?
Construire un argumentaire pour promouvoir son territoire est ardu. Surtout si l’égo local prend le dessus. En effet, nombre d’actions de valorisation sont fondées sur ce que le territoire veut mettre en avant, sur ce qui fait, à ses yeux, sa fierté, sa plus-value. Mais ce n’est pas du marketing. C’est de l’auto-proclamation, pas loin de la vantardise. Surtout, c’est oublier que ce qui importe c’est comment ces messages seront vus, entendus et intégrés par celles qui devraient être au cœur de toutes les préoccupations : les cibles visées.
Ainsi, après un précis et long travail préliminaire de recensement et de catégorisation des atouts territoriaux, il convient de n’avoir ensuite qu’un seul credo : quels sont les arguments qui répondent le mieux aux attentes et aux besoins des cibles que je vise ?
Constituer des groupes de cibles homogènes, aux profils et besoins identiques
Le territoire devra faire au moins deux choses. La première sera d’analyser les besoins et les attentes des cibles visées. Ce qui suppose d’avoir d’abord identifié ces cibles. Puis, il conviendra de voir trop large (par exemple : « les franciliens »), quitte à découper un trop grand groupe, forcément hétérogène. L’objectif est de générer des petits groupes homogènes, garantissant que chacun regroupe les mêmes éléments en termes d’âges, de catégories socio-professionnelles, de type de familles, d’attentes, mais aussi de connaissance préalable du territoire avec son lot de perceptions positives ou négatives, etc …
Les spécialistes du marketing parleront de « persona », ces profils fictifs, stéréotypés et représentatifs d’un groupe précis, aux caractéristiques identiques. Vous l’avez compris, cibler dans le détail ne veut pas dire ne s’adresser qu’à quelques-uns. On peut s’adresser à tous, mais pas en même temps, pas avec le même ton, pas avec les mêmes arguments, et, bien sûr, pas avec les mêmes supports.
Un argumentaire de marketing territorial n’est jamais un bilan de l’action politique
La seconde, certainement douloureuse, est la sélection des arguments en fonction de telles ou telles cibles. Et qui dit sélection, choix, dit renoncement, d’où la notion de douleur évoquée ci-dessus ! En effet, ici la tâche revient à établir un éventail d’arguments et un ordre de présentation qui seront, d’après les études effectuées au préalable, adaptés à chaque cible (à chaque « persona »).
Quitte à évoquer des éléments qui paraissaient a priori « de détail ». Ou quitte à ne pas en évoquer d’autres qui, pourtant, font la fierté des élus, parce qu’il peut s’agir, par exemple, d’investissements lourds qui étaient au centre d’un projet de mandat. Mais si ces derniers sont hors de toutes les attentes de vos cibles, alors ils sont inutiles. Souvenez-vous qu’un argumentaire de marketing territorial n’est jamais un bilan de l’action politique.
De toute évidence, si tous les territoires entendent viser les mêmes cibles et si chacun fait correctement ce travail de ciblage et d’adaptation aux attentes remarquées, le risque est fort de construire le même argumentaire que celui de ses concurrents. Là, il conviendra de vérifier si vos cibles sont vraiment les bonnes. La réponse à rechercher : pour qui mon territoire semble le mieux placé ? Il conviendra aussi de s’appuyer sur ce qui est normalement partie prenante du travail exploratoire évoqué en début d’article : les valeurs collectives, les services proposés, les caractéristiques uniques du territoire. En somme comment, en fonction du « caractère » même du territoire, on tentera de rendre crédible la promesse qu’on répondra mieux que les concurrents aux attentes repérées ? Cette tâche n’est pas simple mais, une fois de plus, le marketing n’est pas une simple campagne de communication. Plutôt, ce peut-être une campagne de communication, mais qui n’aura d’efficience que si elle est est la résultante des études menées en amont. Et non l’inverse.