Depuis quatre ans, Benta Lyon a fait le pari de relocaliser la production de médicaments génériques et de posséder son propre outil de production. Un pari gagnant puisque le laboratoire vient d’obtenir une Autorisation de Mise sur le Marché d’un paracétamol générique. Un modèle à part qui mise sur la proximité, la capacité d’approvisionnement et le « fabriqué en France » pour favoriser l’accès aux soins.
Pouvez-vous nous présenter Benta Lyon, dont l’histoire s’inscrit dans le tissu industriel local et national
Benta Lyon est basé sur le site industriel de Saint-Genis-Laval près de Lyon. Ancien site Sanofi, l’usine a été gérée par le groupe Famar qui réalisait de la sous-traitance, avant d’être reprise à la barre du tribunal en 2020 par Benta Lyon. Cette reprise s’est faite en poursuivant l’activité de sous-traitance pour le marché français et européen, tout en se transformant en laboratoire exploitant en tant que génériqueur français.
Benta Lyon, aujourd’hui, c’est 100 % de production française et de sous-traitants français, hors principe actif. Tout est produit in situ sur notre plateforme industrielle de Saint-Genis-Laval. En quatre ans, le chiffre d’affaires du groupe a atteint 24 millions d’euros, pour 118 collaborateurs, et nous serons 140 à fin 2024. Notre histoire est donc à la fois ancienne et récente !
Pourquoi ce choix du générique 100 % français ?
Notre raison d’être est de proposer une réponse fiable et nationale à la baisse des tensions d’approvisionnement de médicaments en France dans le domaine du générique. Depuis quelques années, on constate en effet une baisse sensible du nombre d’officines de pharmacie sur le territoire national.
Cette baisse est en partie liée au manque de stocks. En avril 2024, Benta Lyon a obtenu une Autorisation de Mise sur le Marché pour du paracétamol comprimé fabriqué dans notre usine. Un symbole très fort lorsque l’on sait que sur les douze derniers mois, 90 % des Français ont pris du paracétamol. C’est une molécule qui parle à tout le monde. Aussi, le fait de le produire en France est extrê-mement important.
En effet, en relocalisant la fabrication de médicaments en France, nous contribuons à lutter contre la pénurie de médicaments que nous avons récemment rencontré, notamment concernant le paracétamol, et nous redonnons du temps de conseil et de soin aux pharmaciens dans les officines. Les pharmaciens passent en moyenne 12 heures par semaine à chercher des boîtes de médicaments, c’est autant de temps qu’ils ne peuvent pas consacrer au conseil ou au soin. Benta Lyon essaie d’être au plus proche des officines. Tout au long de l’année, nous avons une quinzaine de délégués sur le terrain pour incarner cette présence et ce suivi.
Faire le choix du médicament générique, c’est aussi faire celui de la proximité ?
Le générique est un produit mature et de commodité qui parle au plus grand nombre. Notre parti-pris est de nous posi-tionner sur l’accès aux soins pour le plus grand nombre. Pour cela, nous faisons en effet le choix de la proximité. En plus des grossistes et des répartiteurs, nous pouvons distribuer nos médicaments directement aux officines qui en ont besoin, ceci en 24 ou 48 heures. Avec un stockage de plus de 7000 pa-lettes dans notre usine, nous anticipons tout risque de pénurie. Notre force de frappe est énorme.
Relocaliser votre production en France : risque ou opportunité ?
En tant que génériqueur, notre particularité est d’être pra-tiquement les seuls à avoir une capacité industrielle propre.
Posséder son outil industriel propre, en France, permet d’absorber du volume. En capacité potentielle nous pouvons produire jusqu’à 5,5 milliards de comprimés par an. Nous pouvons ainsi mettre à disposition de la capacité locale pour alimenter le marché français.
C’est ce qui nous différencie et nous permet d’être au plus proche. Cette relocalisation réussie nous permet de montrer qu’il n’y a pas de fatalité ! Oui, il est possible de produire en France. La preuve : nous sommes même capables de le faire sur la molécule la plus répandue et connue du grand public. Nous sommes intégrés, nous avons notre propre usine, et nous n’avons pas d’intermédiaires. Quand on se donne les moyens, on peut y arriver.
C’est sans doute pour cette raison qu’en juin 2023, nous avons été lauréat « France 2030 » parmi les huit projets de relocalisation sur les six molécules essentielles réindus-trialisées sur le marché. Nous avons été disruptifs en faisant l’inverse du modèle traditionnel des laboratoires et de l’industrie.
Comment envisagez-vous la suite ?
Le fait d’avoir choisi le paracétamol est fondamental prouve la pertinence de notre modèle et nous va nous permettre de poursuivre notre développement. L’objectif, dans les 12 à 18 mois, est de produire une trentaine de molécules essen-tielles en propre, sous différentes formes : sèches, liquides ou pâteuses. Nos clients sous-traitants, Sanofi, Procter & Gamble, Delbert, nous font confiance et nous «incitent» à poursuivre ce chemin du 100 % français et de la proximité. En France, il existe trois modèles : les groupes de labo-ratoires qui ont leur usine en France, ceux qui ont leur sous-traitant en France, et notre modèle.
Ce choix, c’est aussi une question de conviction et de sens du service. Nous en sommes convaincus : nous avons une responsabilité sociétale pour favoriser l’accès aux soins.
Reste un point : celui du choix du générique. La France a progressé mais peut mieux faire. Le taux de substitution reste bien inférieur à celui de nos voisins européens comme l’Allemagne. Il nous faut donc communiquer, éduquer, informer.