La dernière enquête internationale PISA révèle que les collégiens français ont un moins bon niveau de lecture qu’il y a 25 ans : ils sont tombés sous la moyenne des pays les plus riches. L’enquête montre également qu’en France l’origine sociale des élèves pèse plus profondément qu’ailleurs sur les résultats. Comment redresser la barre pour amener tous les jeunes à maîtriser les fondamentaux et leur permettre de trouver leur place à l’école et dans la société ? Et si l’on pouvait mettre directement des livres entre les mains des bébés et de leurs parents, pour que les enfants y prennent goût avant même l’entrée à l’école ?
Au moment d’arriver en maternelle, certains enfants connaissent deux fois plus de vocabulaire que d’autres. L’aisance avec le langage et la capacité à se concentrer sont des atouts très forts pour démarrer sa scolarité d’un bon pied, d’autant qu’entre 0 et 3 ans le cerveau connaît une fenêtre d’apprentissage inédite. Le plus efficace est donc de consacrer plus de ressources aux tout-petits en faisant rentrer le rituel de la lecture au sein même de leur foyer.
Nombreux sont les puéricultrices et les pédiatres des centres de protection maternelle et infantile (PMI) à confirmer ces constats : dans les salles d’attente des consultations, les parents occupent souvent leurs enfants avec leur téléphone, ils ont rarement le réflexe de prendre un livre ou même de parler avec leur bébé de ce qui les entoure. L’effet s’en fait ressentir à 3 ans : les bilans réalisés en école maternelle montrent des retards de langage croissants.
Pour favoriser l’éveil langagier, le Département du Loiret a lancé en 2019 un partenariat de grande envergure avec 1001mots, association qui a développé un programme pour aider les parents à parler, lire et jouer plus avec leur bébé. L’accompagnement est proposé aux familles les plus vulnérables par les professionnels de PMI de tout le territoire, tant dans les zones rurales que dans les quartiers prioritaires de Montargis et d’Orléans comme la Source et l’Argonne. « Lors des consultations médicales, nous évaluons le développement de l’enfant et notamment le développement du langage, très tôt.
Nous observons également les interactions entre les parents et leurs enfants, explique Brigitte Hercent-Salanié, médecin départemental de PMI. Si nous repérons des interactions pauvres (un parent qui parle peu avec son enfant, un retard de langage ou un enfant « accroché au smartphone »), nous proposons aux familles la démarche 1 001 mots. Dans 90 % des cas, les parents acceptent : ils veulent ce qu’il y a de mieux pour leur enfant et n’ont souvent pas conscience de l’importance de la communication verbale.
Souvent, ils pensent que leur enfant de quelques semaines ou quelques mois ne comprend pas quand un adulte leur parle. Les conseils dispensés par l’association vont venir modifier les pratiques parentales en incitant les parents à interagir davantage avec leurs enfants et, notamment, à laisser les écrans de côté ! ».
Les parents sont au cœur du dispositif : pendant 1 an, ils reçoivent à leur domicile des livres adaptés à l’âge de leur enfant, et des sms réguliers avec des conseils pour intéresser leur enfant au livre, ainsi que des appels d’une professionnelle. Cette dernière instaure avec eux une relation de confiance et les suit de façon individualisée pour adapter les contenus envoyés au contexte de la famille.
En 2023, plus de 1000 familles ont été accompagnées dans le Loiret. « Nous sommes tellement convaincus de l’intérêt de la démarche que nous proposons systématiquement l’action 1001 mots aux familles ! C’est un véritable accompagnement à la parentalité. » confirme Brigitte Hercent-Salanié.
Depuis, d’autres départements ont suivi et proposent également 1001mots aux familles vulnérables comme la Moselle, la Seine Saint-Denis, les Yvelines, les Hauts-de-Seine ou l’Ain…
Et ce n’est que le début car l’ambition de 1001mots est d’éveiller avec les conseils départementaux le langage de 100 000 bébés en 2026 dans plus de 20 territoires.