Le 25 juin, Batiactu Groupe organise les 6e Assises Nationales du Logement et de la Ville à la Cité Internationale Universitaire de Paris. Un événement particulièrement attendu dans un contexte tendu pour le secteur. Rencontre avec Pauline POLGÁR, directrice des rédactions de Batiactu Groupe.
Après deux années particulièrement atones pour le marché immobilier des particuliers, les signes de reprise se font sentir. Êtes-vous prudente ou confiante ?
Je suis d’une nature profondément optimiste, donc je veux rester confiante. Côté achat/vente, parmi les principaux freins côté particuliers qui ont affecté, le marché, il y a notamment eu une conjonction de hausse des taux d’intérêts, entraînant de facto une diminution des obtentions de crédits, le tout dans le contexte d’une baisse du pouvoir d’achat face à l’inflation. Les dernières conjonctures nous révèlent un frémissement de reprise, avec des informations plutôt encourageantes sur les taux, sur le desserrement des crédits et enfin, sur la baisse des prix.
Nous restons dans une année de transition, dans laquelle le marché doit s’adapter à ce nouveau contexte économique – mais finalement, n’est-ce pas un juste retour à la réalité ? – où les taux ne sont plus quasi nuls. Côté locations, je resterai tout de même prudente en revanche : difficile d’anticiper les signes d’une véritable amélioration pour l’instant. Peu de biens arrivent sur le marché, entre obligation de rénovation énergétique d’une part, qui paralysent pour l’instant certains propriétaires et la quasi-fin de l’investissement locatif, d’autre part.
La construction de logements neufs est entrée dans une période de stagnation, et les promoteurs évoquent une crise de plusieurs années. Quels outils permettent, selon vous, d’atténuer les effets de cette crise ?
La crise est là, alors que les besoins sont eux, toujours aussi importants. Difficile pour moi de vous donner les réponses que beaucoup cherchent encore !
Lever les freins administratifs, encourager les maires à bâtir ou programmer intelligemment les besoins en fonction des territoires, c’est bien sûr pertinent. Mais suffisant ? Je ne sais pas.
Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il ne faut pas opposer les différents types d’habitat, ni les usagers. Du logement social au logement privé, en passant par le logement intermédiaire ; de la maison individuelle au collectif, en passant par les résidences gérées ; pour les ménages, personnes seules, étudiants, seniors… Ce qu’il faut améliorer, c’est le parcours de chacun, pour que tous accèdent à un logement digne, abordable, sain et de qualité.
Les enjeux de rénovation et de logement social sont au cœur de la politique du logement en France. Comment permettre au plus grand nombre de bénéficier d’un logement de qualité, écologique et accessible financièrement ? L’équation vous paraît-elle
possible ?
Face à l’urgence climatique, il est primordial d’accélérer la décarbonation de notre territoire, d’adapter les bâtiments et nos villes, tout en améliorant le confort de chacun dans son habitat. C’est tout l’objet de la politique de rénovation : essayer d’agir sur tous les leviers. Là encore, il ne faut en aucun cas opposer ces objectifs, même si cela est difficile, alors que le contexte économique est tendu. Sur le logement social, beaucoup d’efforts doivent encore être faits, afin de répondre à l’ensemble des populations qui sont en attente de pouvoir se loger dignement. Le système du logement social est une force de notre pays qu’il ne faut en aucun cas affaiblir.
Quant à l’équation d’un logement de qualité, écologique et accessible financièrement, là encore, tout le monde cherche à la résoudre, elle est si complexe !
Mais n’oublions pas que de toute crise naît des opportunités. Penser aujourd’hui l’habitat et la ville, c’est aussi imaginer de nouveaux modèles et outils, constructifs, opérationnels et financiers…
Les Assises Nationales du Logement et de la Ville sont un rendez-vous incontournable pour les professionnels, comme pour les décideurs locaux. Quel est l’état d’esprit des acteurs du secteur ? Ont-ils le sentiment que les enjeux du logement sont suffisamment pris en compte au niveau national ?
La multiplication des annonces tentant d’éteindre leur colère et leur inquiétude ne suffisent pour l’instant pas à les rassurer. Les ambitions ne sont selon eux pas encore au rendez-vous. Pour beaucoup, axer l’effort sur le logement intermédiaire par exemple, ne devrait pas se faire au détriment du logement social.
Enfin, les enjeux du logement ont pendant longtemps – je parle en décennies – été perçus d’un point de vue purement économique et à court terme : fiscalité, production pour assurer l’emploi du secteur du bâtiment, etc. Aujourd’hui cela ne peut et ne doit plus être le cas. C’est une question de société qui doit être envisagée comme telle et par tous, à tous les niveaux, à long terme. Les Assises, en rassemblant l’ensemble de la filière, permettent la rencontre entre tous, quels que soient leur institution, discipline ou marché. Leur ambition ? Continuer à alimenter les débats de manière innovante, dynamique et constructive : car c’est dans le dialogue que naissent toujours les solutions pour agir ensemble.