Spécialisée en communication, Cécile DELOZIER accompagne des élus dans leur prise de parole partout en France.
Elle conseille des élus locaux, des parlementaires mais aussi des candidats aux élections dans leur stratégie de communication et leur capacité à persuader et à convaincre en présentiel ou dans les médias.
Sa pédagogie est fondée sur la bienveillance afin de développer la confiance en soi et pouvoir ainsi réaliser des performances.

La rédaction : Un certain nombre de commentateurs critiquent la communication du gouvernement. Qu’en pensez-vous ?
Cécile DELOZIER : J’observe deux tendances opposées, entre professionnalisme et amateurisme. Gabriel Attal, notre premier ministre, fait preuve d’une grande agilité dans ce domaine. Sa communication est construite, organisée, d’une efficacité redoutable. Revenons aux faits. En pleine session parlementaire, il est soit disant surpris en train de regarder des photos d’animaux domestiques sur son téléphone portable. Scandale ! Notre premier ministre manquerait de concentration voire serait méprisant à l’égard des députés ! Honte à lui ! Puis deuxième séquence, quelques jours plus tard, il poste une photo de lui et de son jeune chien sur les marches de Matignon. La photo est parfaite : tenue vestimentaire de week-end, chiot adorable , posture décontractée sur les marches, sourire éclatant… Tout est là pour le rendre sympathiqu. À cela s’ajoute un story telling impeccable : sa famille lui aurait offert ce chien pour le féliciter de sa nomination à Matignon. De premier ministre dilettante, Gabriel Attal devient un trentenaire sympathique ! Il dégage avec cette séquence parfaitement rythmée une humanité généreuse pleine de simplicité, très loin de la froideur prêtée aux politiques. Cependant, quand on observe l’évolution des mentalités des Français à l’égard de la cause animal et quand on liste les projets municipaux pour créer par exemple des cimetières canins, on peut se demander quelle est la part de machiavélisme dans cette mise en scène si brillante.
LR: Trop de communication tuerait la communication ? Vous pensez que cet épisode n’est pas réussi ?
CD: Je crois que c’est quand même un succès. Pour deux raisons. Premièrement parce que l’image de Gabriel Attal en jeans, ti-shirt blanc , radieux avec son chiot est très forte. Elle dégage une jouvence et une fraîcheur peu communes en politique. Deuxièmement parce que cette image-là a été vue de tous ( y compris de tous les abstentionnistes ), tandis que les épisodes de l’assemblée nationale n’ont touché qu’un public restreint d’experts, de passionnés de politique donc un public beaucoup moins nombreux.
LR: Quelle séquence vous a paru manqué?
CD: La nomination du gouvernement a été très étrange. L’attente excessive et en deux temps des ministres a semblé inexplicable.
Cela me paraît d’autant plus regrettable qu’il donne un mauvais exemple aux collectivités. Dans un monde où tout s’accélère, où les enjeux économiques, financiers, politiques se jouent dans un contexte international concurrentiel, il est maladroit d’avancer le nom des décideurs nationaux au rythme d’un escargot. À tous les niveaux ( logements , transports…), les collectivités attendaient des décisions urgentes et se désespéraient d’un silence inexplicable . Cet épisode a été préjudiciable pour tous…
LR: Donc pour bien communiquer il faut parler au plus grand nombre et ne pas imposer des délais aberrants ?
CD: Parler rapidement au plus grand nombre oui, et aussi parler clairement ! Diffuser un message clair me paraît fondamental. J’ai été frappée par la communication de Greta Thunberg venue en France soutenir les zadistes opposés à l’autoroute A69. Je ne discute pas son engagement auprès des écologistes, ce n’est pas mon sujet , mais elle est venue arborant un keffieh palestinien autour du cou. Ce signe pro palestinien a été peu relevé et commenté par les journalistes. Je trouve pour ma part qu’il brouille son message. Inversons le procédé. Imaginerait-on lors d’une manifestation pro-palestinienne des pancartes sur l’A69? Cela paraîtrait absurde… Pour communiquer, soyons clair, simple et rapide !
Dans un monde où tout s’accélère, où les enjeux économiques, financiers, politiques se jouent dans un contexte international concurrentiel, il est maladroit d’avancer le nom des décideurs nationaux au rythme d’un escargot.