Attendu d’une part :
– Que la protection de l’enfance est une compétence centrale au sein des missions de solidarités exercées par les Départements,
– Que les moyens consacrés à cette mission par les Départements ont plus que doublé en 20 ans, pour atteindre près de 10 milliards d’Euros, assumés entièrement par les Départements,
– Que depuis la décentralisation de la prise en charge des enfants en danger, les Départements et leurs personnels ont fait la preuve de leurs capacités à résoudre, au plus près du terrain, les fractures familiales et à protéger les enfants qui leur sont confiés,
– Que l’État, dans le domaine de la protection de l’enfance, peine à assumer ses obligations régaliennes relatives à la Protection Judiciaire de la Jeunesse, à la santé scolaire et au service social en faveur des élèves, à la prise en charge en pédopsychiatrie et dans le secteur médico-social à destination des enfants en situation de handicap,
– Que les dispositions de la loi Taquet systématisant pour les Départements la proposition d’accompagnement des jeunes majeurs entre 18 et 21 ans, ce qui implique la mise en place de nouveaux dispositifs et moyens dédiés,
– Que l’augmentation du nombre des enfants confiés et la multiplication des besoins amènent à la saturation des structures d’accueil et empêchent les Départements d’exécuter l’ensemble des décisions judiciaires.
Attendu d’autre part :
– Que la politique migratoire est une compétence de l’État et de l’Union Européenne,
– Qu’après une période de relative accalmie, les flux migratoires ont retrouvé leurs niveaux d’avant la crise Covid,
– Que cette reprise entraîne une très forte augmentation du nombre de personnes se présentant comme Mineurs Non Accompagnés, auprès des services départementaux de l’enfance,
– Que la présence des MNA sur le territoire national n’est pas le fait des Départements et que les jeunes concernés relèvent, en conséquence, de la solidarité nationale et non de la solidarité départementale, mais que nous accompagnons ces mineurs au titre de la compétence en matière de protection de l’enfance, conformément au principe défini par la Convention Internationale des Droits de l’Enfant et rappelé par le Conseil d’État,
– Que les Départements consacrent au moins 1,5 milliard d’euros chaque année à la prise en charge des MNA et que l’État ne rembourse qu’une infime partie des sommes engagées par le Départements,
– Qu’il convient, enfin, de distinguer la protection de l’enfance de celle des jeunes adultes,
Les Départements de France demandent à l’État de prendre les mesures législatives ou de proposer des évolutions réglementaires afin :
1- De prendre en charge la responsabilité et d’assumer le coût de la mise à l’abri des personnes se présentant comme Mineurs Non Accompagnés, afin de soulager les structures départementales, le temps de l’évaluation de leur minorité, évaluation qui doit rester une compétence des Départements,
2- De donner aux Départements les moyens de procéder à une évaluation incontestable de la minorité des requérants en harmonisant, sur tout le territoire national, le cahier des charges de cette évaluation,
3- De compenser à l’euro près les dépenses engagées par les Départements en matière de prise en charge des MNA reconnus comme tels,
4- D’autoriser, quand les structures de l’ASE sont saturées, l’accueil en hôtel, gîtes collectifs et autres locations touristiques, des MNA de plus de seize ans, avec un accompagnement éducatif, en conservant l’objectif d’éviter le recours aux dispositifs hôteliers pour tous les enfants,
5- De modifier la loi pour redonner aux Départements la faculté d’appréciation de l’opportunité de conclure un Contrat Jeune Majeur, en fonction de la motivation, du parcours et du projet pour l’autonomie du jeune qui, conformément à la loi, est élaboré lors de l’entretien des 17 ans,
6- D’éviter les ruptures des parcours d’insertion ouvrant des perspectives d’emplois aux MNA au moment de leur accession à la majorité, par une décision administrative d’Obligation de Quitter le Territoire Français,
7- De faire en sorte que la conclusion d’un Contrat Jeune Majeur n’exclut aucun jeune adulte des dispositifs de droit commun (foyers de jeunes travailleurs, contrat d’engagement jeune, missions locales…)
8- De mettre en place dans les meilleurs délais les conditions d’un échange structuré entre les Départements et la protection judiciaire de la jeunesse, les autorités judiciaires, la santé, l’éducation nationale, afin de remédier aux carences constatées de l’État et d’aboutir à une vision et des stratégies partagées de la protection de l’enfance, à laquelle tous concourent.
L’UNICEF France s’est dit « très préoccupé par la résolution adoptée par la commission exécutive de l’Assemblée des Départements la semaine dernière dans laquelle l’association d’élus demande à l’État de prendre la responsabilité de la mise à l’abri des mineurs non accompagnés (MNA) durant la phase d’évaluation, de compenser entièrement leur prise en charge au titre de l’ASE, d’autoriser le placement à l’hôtel de ceux ayant plus de 16 ans et de revenir sur les garanties de protection pour ceux qui deviennent majeurs ».
Cette résolution entre en totale contradiction avec la Convention des Droits de l’Enfant et son interprétation par le Comité des Droits de l’Enfant.