Pensez-vous que la protection de l’enfance traverse une grave crise ? Et, à quoi attribuez-vous la situation actuelle ?
La situation est très tendue. Les Départements font face à une croissance importante des enfants confiés avec une forte montée du nombre de mineurs non accompagnés, 44 % de plus pour le Maine-et-Loire.
Les Départements mettent des moyens financiers considérables. Malgré tout, les professionnels manquent. Ces métiers demandent un engagement fort, peut-être trop important. Nous peinons à recruter et à renouveler. Certaines mesures ne peuvent être mises en place faute de personnel. Le nombre de places d’accueil reste souvent insuffisant.
Les Départements souffrent aussi d’un désengagement fort de l’État sur ses compétences propres : un manque de places en structures IME-ITEP pour les enfants en situation de handicap, une insuffisance notoire des moyens de la pédopsychiatrie, une faiblesse de la protection judiciaire de la jeunesse.
Nous accueillons des enfants qui demandent une prise en charge relevant du champ de la santé. Ces derniers viennent se rajouter à tous les enfants confiés. Le système sature. Les enfants n’ont pas la prise en charge adaptée à leur situation.
Qu’avez-vous pensé de l’interpellation des Départements de gauche et de leur réception par la ministre, Charlotte Caubel ?
L’interpellation de quelques départements de gauche, est surprenante !
Nous n’avons pas été sollicités avec le Président de Département de France, François SAUVADET, ni aucun président de la droite, du centre et des indépendants alors que le sujet est au cœur des discussions de nos instances.
Les départements de gauche ont pourtant été invités à travailler avec nous sur ces questions.
Quelle est la finalité de cette démarche ? C’est la question que je me pose.
Les membres de la tribune participent au groupe de travail Enfance de Départements de France, et certains siègent à France Enfance Protégée au bureau et au conseil d’administration. Ils n’ont pas évoqué ce sujet dans ces enceintes. On le découvre par voie de presse. Personnellement, je regrette la manière.
Je n’ai bien sûr aucun commentaire à faire sur les personnes qui sont reçues par Madame la Secrétaire d’État à l’Enfance avec qui j’entretiens une relation de confiance.
Etes-vous favorable à ces États-Généraux de l’enfance ?
D’abord je voudrais rappeler notre mobilisation à Départements de France depuis le début du nouveau mandat : une vice-présidence à l’enfance, un groupe de travail dédié, une collaboratrice supplémentaire. Tous les Départements ont considérablement accru leur budget concernant la protection à l’enfance.
Aujourd’hui tous les acteurs de l’Enfance sont rassemblés dans France Enfance Protégée qui est le lieu unique de dialogue et de travail qui réunit outre les Départements, l’État et les associations. J’invite mes collègues présidents à s’y exprimer.
Je rappellerai aussi que des Départements ont déjà organisé des assises sur leur territoire comme la Collectivité Européenne d’Alsace. D’autres ont mis en place des observatoires départementaux de la Protection de l’Enfance (ODPE) qui sont des lieux de partage.
Le groupe de travail Enfance se réunit chaque trimestre et rassemble une soixantaine de départements et les initiateurs de la démarche y siègent. L’attractivité des métiers, les mineurs non accompagnés, le contrôle des antécédents judiciaires, la double évaluation, l’hébergement hôtelier, les jeunes majeurs y ont été abordés…
Nous venons de lancer le recueil des bonnes pratiques pour une meilleure prise en charge et favoriser la meilleure diffusion. Agissons ensemble.
Quelles solutions préconisez-vous ?
L’attractivité des métiers doit être la priorité pour avoir des professionnels en nombre important pour mieux accompagner les enfants et nous permettre de faire face à la situation actuelle.
La Ministre des Solidarités, Aurore BERGE, que j’ai rencontrée sur ma mission autour des signalements dans les lieux d’accueil du jeune enfant est très sensible sur ce sujet du recrutement dans les métiers des services à la personne.
Autre axe à renforcer, la prévention pour éviter la dégradation des situations, mieux accompagner la parentalité, et éviter le placement des enfants qui est toujours traumatisant.
Nous avons besoin de travailler avec tous les partenaires et construire ensemble des actions fortes dans l’intérêt des enfants, pour leur donner un vrai parcours de vie.