Élu Président du Département en 2022, vous découvrez alors le Conseil départemental ?
Marc Fleuret : Non, car j’étais déjà Conseiller départemental, et cela depuis 2015. En fait, tout a commencé ici, dans le bureau où nous nous trouvons. Louis Pinton, le Président de l’époque, me demande d’être candidat sur le canton réputé imprenable de Châteauroux III. Le sortant est en place depuis 1972 et semble indéboulonnable. Mais le Président me persuade de m’y coller pour me faire la main, apprendre.
Formation expresse ! Avec ma binôme, Chantal Montjoie, elle aussi adjointe à Châteauroux, nous menons une campagne hyper active de porte à porte, de rencontres, d’écoute et, contre toute attente, nous sommes en tête à l’issue du premier tour. Les candidats du Parti Socialiste nous soutiennent contre le Rassemblement National.
Donc élu en 2015 ?
Marc Fleuret : Tout à fait, et je deviens alors président de l’Agence de développement touristique. Responsabilité passionnante et absorbante qui donne une vision départementale.
Nous développons les relations avec les offices de tourisme et créons un vrai maillage territorial, apprenons aux acteurs à travailler et à construire ensemble plutôt que de développer une espèce de concurrence inutile et stérile.
Un an et demi après ma large élection comme maire de Déols, le Président du Département annonce, à la surprise générale, qu’il ne repartira pas et me demande de devenir chef de file de la majorité pour les prochaines élections. Après avoir consulté ma famille, je décide de saisir cette opportunité.
Serge Descout assume son choix devant la majorité de l’assemblée départementale. Personne n’a osé remettre ce choix en cause et une vraie dynamique s’est installée. Nous avons mené une bonne campagne électorale, avec une grosse unité : programme commun, documents communs. Déclinaison sur les territoires, un vrai esprit d’équipe et le soutien effectif de Serge Descout..
Nous l’avons emporté dans onze cantons sur les treize n’en laissant que deux à l’opposition (Argenton et Issoudun). Vrai succès collectif pour le centre droit et les divers droite.
Arrive alors la tâche toujours compliquée de composition de l’exécutif avec un nécessaire rajeunissement de l’équipe et des équilibres géographiques. Là encore, l’expérience de Serge Descout a représenté un atout. Ce fut aussi l’occasion de m’affirmer comme Président !
Vous percevez une différence entre votre responsabilité de vice-président et celle de Président ?
Marc Fleuret : Assurément ! Élu président, j’ai compris qu’il fallait bosser davantage ! Il y a une multitude de dossiers complexes, très complexes. Donc il faut être attentif. Je m’imprègne de l’expérience des anciens, c’est ma formation de judoka ! Et surtout j’écoute beaucoup. J’ai dû m’imprégner de beaucoup de domaines, définir les priorités, les prévoir étapes par étapes. La difficulté est que je sois arrivé, comme vous le disiez, après une ascension assez rapide. Il a fallu que je m’imprègne d’une multitude de sujets. Il faut classer les choses, les faire étapes par étapes, parce que je dois opérer une reprise en main ici, localement, du politique sur les services
Donc là, c’est pour ça que je le dis maintenant, c’est l’enfance dans sa globalité qui va être ma priorité.
Qu’aimeriez avoir réalisé à la fin de votre mandat ?
Marc Fleuret : Il faut toujours avoir conscience qu’on est en CDD. C’est très important. Je reste identifié comme acteur du sport, mais je dois prouver que je maîtrise les autres domaines. Notre premier gros investissement, trois millions d’euros, concerne la plaine départementale des sports. Un lieu unique, absolument exceptionnel, dont je parle avec mesure pour tant pour ne pas être trop associé au sport ! Mais deux mots tout de même ! Sept hectares, avec les équipes de France de beach soccer, de handbeach qui viennent s’entraîner ici. Ils l’appellent le petit Clairefontaine sur sable. C’est vraiment un lieu identifié, facteur d’attractivité. Ce sont 50 000 indriens qui y passent tous les ans.
Ma priorité principale concerne l’enfance. Il nous faut reconstruire notre foyer de l’enfance tout en autorisant la poursuite de l’activité. Nous avons donc décidé de construire une aile neuve autour du foyer actuel. Construction adaptée, moderne, et exemplaire sur le plan écologique.
A titre personnel, je m’intéresse beaucoup à ces sujets de l’enfance. Je siège au conseil d’administration de France Enfance en danger. J’ai conscience que nous devons faire plus et mieux, rassurer les éducateurs
Je parle avec eux et je visite les lieux. Des locaux mal adaptés, avec des étages, des difficultés de surveillance, de mélanges des générations. Nous regardons ce qui se fait ailleurs pour nous inspirer des bonnes pratiques.
Seconde priorité : le climat. Dans ce secteur, nous sommes très volontaristes et assez exemplaires. Nous avons initié, avec l’État, une démarche, Climat 36, dans le but de s’adapter au changement, avec des formations pour l’ensemble des élus du département. Deux sessions qui ont affiché complet avec plus de 100 élus à chaque fois !
En parallèle, des fonds spécifiques existent pour aider les communes qui souhaitent implanter des récupérateurs d’eau, favoriser le verdissement des cours d’école…
Dans le même esprit, nous développons les mobilités douces sur des axes touristiques, mais aussi les améliorations des pistes cyclables destinées aux enfants, pour se rendre au collège.
Enfin, nous avons adopté un plan de 30 millions d’euros sur les dix prochaines années qui concerne les bâtiments départementaux, (amélioration énergétique, mise en place de panneaux photovoltaïques sur les toitures des collèges…)
Troisième priorité : l’aménagement du territoire. Nos différents fonds (d’aménagement rural et aménagement urbain) représentent environ 18 millions d’euros, avec une enveloppe par canton distribuée par le conseiller départemental. De plus, il existe de nombreux fonds spéciaux. Cela va de la vidéoprotection en passant par les routes, par les aménagements des équipements communaux, les salles des fêtes, les centres bourgs, les aménagements des centre bourg etc. Autant de projets déposés, autant de projets financés.
Et puis une implication dans le domaine de la culture ?
Marc Fleuret : Secteurs très importants où le Département joue un rôle essentiel, comme à Valençay où nous assurons la charge de l’investissement. L’Indre propose aussi des festivals de renommées internationales, comme Nohant, Lisztomanias, (festival classique des luthiers avec plus de 20 000 personnes tous les ans), DARC, stages de danse. Et puis il y a de petits festivals d’envergure nationale qui montent en puissance comme Ambrault, festival de blues, qui rassemble 3000 spectateurs chaque année.
Dans le domaine touristique : Valençay accueille 80.000 visiteurs. Il doit évoluer, se raccrocher au Val de Loire et développer des animations. Nous souhaitons implanter dans l’Orangerie que nous avons récemment restaurée un restaurant étoilé et un restaurant familial. Nous venons de lancer pour cela une DSP pour la gestion.
D’autres lieux touristiques importants se développent, comme le Parc de la Haute Touche, (60 000 visiteurs.), Nohant, marqueur de notre département, avec George Sand, la maison du vin et du fromage qui est à Pouligny Saint Pierre, avec 20 000 entrées par an, Déols, site clunisien, a déposé sa candidature au patrimoine mondial de l’Unesco.
Je demande souvent aux visiteurs où se trouve la plus grande structure métallique en France. En général, on me répond à la tour Eiffel. En fait, c’est à la base de Ronet où les pylônes sont plus hauts de dix mètres par rapport à la tour Eiffel.
Vrai problème auquel mon prédécesseur s’est attelé. Nous avons plusieurs axes : l’aide à l’installation, l’aide à l’hébergement de nos jeunes étudiants via un partenariat avec notre office HLM. Celui-ci est capable de trouver à peu près sur tous les lieux du département un hébergement bon marché pour eux, rapidement, en meublé. Aide de 1000 € par mois pour les étudiants en troisième année. Et puis une démarche de cocooning : le médecin souhaitant s’installer dans l’Indre avec son conjoint va bénéficier d’un accompagnement sur mesure.
Nous travaillons aussi avec l’université de Cluj en Roumanie, en allant chercher des jeunes directement là-bas.
Quelle est la situation du département en termes de démographie médicale ?
Marc Fleuret : Vrai problème auquel mon prédécesseur s’est attelé. Nous avons plusieurs axes : l’aide à l’installation, l’aide à l’hébergement de nos jeunes étudiants via un partenariat avec notre office HLM. Celui-ci est capable de trouver à peu près sur tous les lieux du département un hébergement bon marché pour eux, rapidement, en meublé. Aide de 1000 € par mois pour les étudiants en troisième année. Et puis une démarche de cocooning : le médecin souhaitant s’installer dans l’Indre avec son conjoint va bénéficier d’un accompagnement sur mesure.
Nous travaillons aussi avec l’université de Cluj en Roumanie, en allant chercher des jeunes directement là-bas.
Et concernant l’attractivité de manière plus globale ?
Marc Fleuret : Notre agence, née en 2019, est présidée par un chef d’entreprise.
Aujourd’hui, on en voit les freins. Il faut imaginer une co-présidence, élu et chef d’entreprise, car, avec un million d’euros de subvention, le Département apporte à peu près le budget annuel. Elle représente vraiment le bras armé du département.
L’agence développe avec efficacité trois axes: le volet touristique, le médical, et la démographie, en attirant de nouveaux habitants.
Vous bénéficiez d’une situation financière tout à fait originale ?
Marc Fleuret :
Oui, et c’est le résultat d’une bonne gestion ! L’absence d’endettement nous permet d’envisager avec sérénité le court terme, et de poursuivre et développer notre politique de fonds pour l’aménagement du territoire.
Et cela nous permet aussi d’investir comme pour la déviation de Villedieu, avec un financement de 23 millions d’euros sur un axe Tours – Châteauroux, particulièrement emprunté ou comme la réfection des centres d’action sociale de Châteauroux et du Blanc.
Les liaisons ferroviaires ?
Marc Fleuret : Nous nous impliquons beaucoup dans la ligne POLT qui concerne trois gares : Issoudun, Châteauroux, Argenton. J’ai réussi à rassembler les trois communes. Unis, nous sommes plus forts.
Il y a aussi l’axe ferroviaire Tours – Châteauroux pour lequel nous espérons, mais en vain pour l’instant, l’investissement de la région
L’Indre doit bénéficier d’un désenclavement ferroviaire ! Il y a 20 ans, Paris se trouvait à 1h59. Il faut maintenant 2h20 !
Souhaitez-vous un rapprochement avec le Cher dans une entité Berry ?
Marc Fleuret : Pour l’instant, j’y suis totalement opposé. Le département du Cher est très endetté, ils ont plus d’élus.
Nous travaillons très bien ensemble sur un certain nombre de dossiers comme le tourisme.
Paradoxalement, vous n’avez pas évoqué le sport ?
Marc Fleuret : Je conserve l’image d’un homme engagé dans le secteur sportif, mais un président doit s’investir dans tous les secteurs. Cependant, l’Indre va se trouver dans le petit club des quatre villes françaises où se dérouleront des épreuves olympiques du premier tour jusqu’à la finale. Grâce à notre centre olympique de tir, unique en Europe.
Il était envisagé de construire un stade temporaire en Seine-Saint-Denis mais avec insuffisamment de place et un empiétement sur une zone Natura 2000. Châteauroux devenait le plan B incontournable sur lequel nous avons beaucoup travaillé. Il s’agit d’une opportunité d’attractivité pour notre territoire. Nous accueillerons avec fierté la flamme olympique. La ville et le département ont toute légitimité pour cela.
Cette réussite tient à notre entente avec Gil Avérous. Nous travaillons de manière très fluide et facile. Une chance pour le territoire !
Parlez-nous de vos relations avec le maire de Châteauroux ?
Marc Fleuret : Quand il y en a un devant, l’autre n’est pas loin derrière. Cela aide vraiment au quotidien. L’entente se développe entre élus et aussi entre services qui travaillent de façon fluide et efficace
En arrivant à la présidence j’apparaissais comme un urbain et certains ruraux s’inquiétaient d’un tropisme en faveur de Châteauroux métropole. Je me suis donc appliqué à démontrer que le Département n’oubliait pas le secteur rural. J’ai rencontré tous les maires du département, pour leur démontrer l’équité de notre action entre le monde rural et le monde urbain.
Le Président a aussi une responsabilité de patron de l’exécutif et des relations avec les services administratifs. Comment cela se passe t-il ?
Marc Fleuret : Je m’implique totalement dans les dossiers. Je veux comprendre et je demande aussi des comptes.
Il s’agit d’une attitude nouvelle qui a un peu surpris les services au début.
J’ai rencontré tous les agents. J’ai visité tous les services, en deux ans. Le retour des gens de terrain permet d’identifier les axes d’amélioration possibles. Car ce sont les élus qui doivent donner l’impulsion, la direction. Les services apportent des suggestions, des propositions et appliquent les décisions prises par les élus.
Dans ce cadre, nous travaillons main dans la main avec les services en respectant chacun sa place.
J’ai aussi besoin d’informations, de tableaux de bord. Par exemple, je dois pouvoir suivre le nombre de MNA de façon très régulière, connaître les chiffres essentiels.
Enfin, petit département de 218.000 habitants nous devons sortir, regarder ailleurs, participer aux réunions nationales, participer aux réseaux sociaux…
J’apprends aux réunions de l’ADF, je bois les paroles de mes collègues. Depuis quelque temps j’ose m’exprimer.
Comme avec le Journal des Départements, l’Indre participe et affirme sa présence.