Le contexte d’urbanisation croissante, accompagné d’une recrudescence des inégalités économiques, sociales et territoriales, invite à repenser l’organisation des sociétés et des modes de vie. Les managers publics locaux en charge des stratégies d’attractivité territoriale, qui travaillent notamment pour des collectivités territoriales ou leurs groupements, relèvent ainsi des défis de transitions. Afin de caractériser les fonctions de ces managers publics, il s’agit de mettre en perspective le contexte dans lequel s’inscrivent ces pratiques : la recherche d’équilibre inhérente à la notion d’attractivité, et l’essor du management public collaboratif, qui répond aux injonctions législatives de partage du travail et des ressources entre les différents échelons territoriaux.
Concept multidimensionnel et pluridisciplinaire, l’attractivité territoriale se comprend comme un processus combinant, d’une part, l’attraction de ressources temporaires ou durables (résidents, entreprises, touristes, événements) en vue de favoriser un développement exogène du territoire et, d’autre part, la rétention et mise en synergie de ces ressources, encourageant un développement endogène du territoire.
L’attractivité est un mot à la mode, qui séduit tant les politiques que les managers et les chercheurs, comme le montre son usage dans les classements et palmarès nationaux et internationaux des villes depuis une décennie. Le tableau ci-après illustre l’essor de l’utilisation de ce mot dans les recherches académiques françaises en fonction des disciplines. Cet engouement se matérialise également par la création d’une Chaire universitaire, la Chaire Attractivité et Nouveau Marketing Territorial, hébergée par l’Institut de Management et Gouvernance Territoriale d’Aix-Marseille-Université.
Les informations sont collectées sur le site www.cairn.info, et répondent aux critères de recherche avancée suivants : « attractivité », dans « titre d’article/chapitre » (excluant les résumés, les bibliographies, les titres de revues/collections et les titres d’ouvrages/numéros). Les requêtes ont alors fait varier les résultats selon les disciplines et les années.
Les démarches d’attractivité, notamment portées par les managers publics locaux, s’inscrivent dans un contexte plus global de réforme des collectivités territoriales et de leurs groupements. Fusion des régions, essor des métropoles, redéfinition du partage des compétences entre les différences échelons de territoire ; illustrent les tendances au management public collaboratif impulsées par l’acte III de la décentralisation.
Plus largement, « l’effondrement » du nouveau management public (NPM) caractérisé par Lapsley en 2008, dans son article intitulé
« L’agenda du NPM : retour vers le futur », signifie que les précédentes vagues de réformes des institutions, et du secteur public n’avaient pas eu les effets escomptés. Courant post-NPM, le management public collaboratif bénéficie d’une attention croissante dans la recherche et la pratique en management public, même s’il n’existe pas de consensus sur la manière dont la collaboration et la gouvernance collaborative devraient être définies.
Nous privilégions l’approche d’O’Leary et de ses collègues (2006), qui définissent le management public collaboratif comme « un concept qui décrit le processus de facilitation et de fonctionnement dans le cadre d’ententes multi-organisationnelles pour résoudre des problèmes qui ne peuvent pas être résolus, ou pas facilement résolus, par une seule organisation. Collaborer, c’est travailler ensemble, c’est coopérer pour atteindre des objectifs communs, en travaillant au-delà des frontières dans des relations multisectorielles ». La collaboration, la coopération et la coordination supposent la participation (plus ou moins grande) des acteurs dans le processus de décision publique.
Le travail de thèse de Carmouze (2020), qui repose notamment sur l’analyse d’entretiens réalisés auprès de soixante managers publics locaux en charge de l’attractivité a permis de qualifier trois fonctions de ces managers. C’est ce que montre la Figure ci-après.
Pour conclure, dans un contexte d’adaptation de l’organisation des sociétés et des modes de vie, la réforme des organisations publiques locales incite les managers publics des collectivités territoriales et de leurs groupements, en charge de la définition et la mise en œuvre des démarches d’attractivité, à adapter leurs pratiques, leurs méthodes et leurs outils. Le manager public local est donc également pédagogue et diplomate afin d’organiser les collaborations nécessaires permettant de penser une attractivité du territoire, équilibrée dans le temps et dans l’espace, répondant aux besoins des parties prenantes locales.