Au-delà des réponses de l’Etat et des collectivités évoquées dans nos billets précédents, la télésanté suscite bien des espoirs, à commencer par celui d’apporter une part de la solution aux déserts médicaux géographiques qui progressent chaque année. Elle peut indiscutablement faciliter l’accès aux soins des patients en manque de médecin traitant ou autre professionnel de santé, réduire les délais pour un rendez-vous chez un médecin généraliste ou un spécialiste, désengorger les urgences embolisées par les soins de santé primaires non programmés qui y viennent à tort.
Tous les feux sont au vert
Les principes fondamentaux qui guident la télémédecine, et plus largement la télésanté, sont connus.
Mais nous pouvons rappeler, qu’en première lecture, tous les feux sont au vert pour la télésanté dans les déserts médicaux aussi bien du côté des patients qui plébiscitent ce mode de consultation que du côté des professionnels de santé : les praticiens s’ouvrent à la télémédecine ; les pharmaciens d’officine, infirmiers et autres professionnels de santé sont dans les starting-blocks pour assister les patients en difficulté, voire pratiquer le télésoin ; la technologie numérique permet de réaliser des téléconsultations de qualité et sécurisées, depuis le 15 septembre 2018, les téléconsultations sont prises en charge par l’Assurance maladie.
Les modèles de déploiement de la téléconsultation dans les déserts médicaux géographiques
Un modèle de déploiement d’une téléconsultation « simple »
Le modèle du patient autonome ayant besoin d’une téléconsultation simple médecin/patient ou Business to Consumer (BtoC) est le cas le plus simple : le patient réalise une téléconsultation avec un professionnel de santé, assis sur son canapé ou au bureau entre deux réunions. N’ayant besoin d’aucune assistance pour un relevé de constantes biologiques (tension, poids, température, etc.), pour une pathologie mineure ou un renouvellement d’ordonnance, il n’a pas à se rendre dans un lieu d’accueil particulier pour réaliser la téléconsultation.
Pour trouver un médecin, le patient n’a que l’embarras du choix parmi l’offre pléthorique de plateformes privées et publiques de téléconsultation BtoC qui lui sont proposées.
Un modèle de déploiement d’une téléconsultation « assistée »
Le deuxième cas est celui de la téléconsultation en ambulatoire nécessitant l’accueil du patient par un télé assistant pour une prise de constantes avec des dispositifs médicaux connectés (stéthoscope, tensiomètre, électrocardiogramme, oxymètre, otoscope, dermatoscope, etc.). Ce modèle médecin/télé assistant/patient ou Business to Business to Consumer (BtoBtoC) nécessite que la téléconsultation se réalise dans un lieu dédié du territoire sous dense où exerce le télé assistant (infirmier, pharmacien, orthoptiste…).
Pour le déploiement de ce modèle dans des lieux d’accueil (étiquetés santé ou non) des territoires prioritaires, les collectivités territoriales – communes, départements et régions– jouent un rôle majeur dans la structuration et le financement du dispositif de télé assistance. La prise en charge insuffisante de ces évolutions par l’Assurance maladie limite les candidats à la télésanté avec télé assistance, modèle pourtant abouti de la téléconsultation.
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Même si tous les feux sont au vert, le déploiement de la télésanté risque de demeurer très balbutiant dans les déserts médicaux si on s’en tient, sans distinguo, au carcan réglementaire actuel.
Pourquoi fixer ces limites alors que nous venons de vivre une crise sanitaire sans précédent qui a vu enfin les professionnels de santé se lancer dans la télémédecine ? Pourquoi ces injonctions contradictoires ?
Même si chacun est en droit d’attendre de notre système de santé qu’il procure un accès simple et rapide à des soins de qualité, le chemin est encore long pour que la télémédecine prenne, en particulier pour les déserts médicaux, toute sa dimension étymologique : la télémédecine, c’est la pratique de la médecine à distance, à toute distance.