Challenge difficile que d’accueillir les 1000 congressistes lors de ces assises des Départements de France en Lot-et-Garonne, à Agen.
Des participants qui ont dû parfois chercher un hébergement à plusieurs dizaines de kilomètres.
Mais le Département a gagné le pari et accueilli avec efficacité Présidents, élus, administratifs, ministres. Grâce à la mobilisation des équipes du Département.
Merci à Sophie Borderie, Présidente du Département du Lot-et-Garonne et à tous ceux qui ont, souvent dans la discrétion et dans l’ombre, apporté un appui déterminant.
Quelques congressistes inquiets de l’absence de carburants avaient, en dernière minute,
annulé leur venue, mais quasi tous les Départements étaient représentés.
Départements de France avait décidé de s’appuyer sur la volonté de dialogue et de co-construction amorcée par la Première ministre depuis le début de l’été, en invitant un ministre à intervenir sur chaque table ronde.
Partenaire média de ces assises, Le Journal des Départements a suivi avec intérêt les ateliers et tables rondes.
Tout d’abord, comme une introduction à l’ensemble des responsabilités et compétences « Les Départements au cœur des défis de la vie », puis un éclairage sur « Les jeux Olympiques et
Paralympiques dans les Départements » en présence de Tony Estanguet. Un atelier sur la restauration collective. Comme toujours, on a pris du retard, ce qui fait que l’inauguration du village des partenaires a été rapidement écourtée, ce qui a agacé les stands oubliés. Et pourtant, ils étaient nombreux et beaucoup de locaux qui avaient accepté de jouer le jeu.
L’après-midi se poursuivait avec plusieurs ateliers sur la transition énergétique ou la commande publique.
Christophe Béchu a rappelé qu’il fut Président de Département durant 10 ans (élu le plus jeune Président en 2004 à 29 ans), comme pour prouver qu’il connaissait bien les problèmes des Conseils départementaux.
Comme chaque année l’intervention de Gérard Larcher a été écoutée avec attention. Il a considéré que les annonces du Président de la République sur une nouvelle étape de la décentralisation devait être écoutées avec prudence : « Sans vouloir être cruel, c’est la troisième annonce : 2017, puis 2019 et maintenant 2022 ! Je souhaite que ce soit enfin la bonne annonce pour notre territoire et pour notre pays » ! A la fin de son discours, il a eu droit à une standing ovation.
Mais globalement, on sentait que les Ministres présents retenaient leur parole pour ne pas griller la Première Ministre qui devait s’exprimer en fin de congrès, après avoir entendu les discours de Nicolas Lacroix le Président du groupe Droite Centre et
Indépendants et Jean-Luc Gleyze, le Président du groupe de gauche. Las, les ministres quittaient la salle pour accueillir la première Ministre et les deux orateurs durent s’exprimer devant des bancs ministériels vides ce que Jean-Luc Gleize souligna avec regret et insistance. Maladresse qui s’apparentait à une certaine forme d’irrespect.
François Sauvadet, Rappelant que de plus en plus de Français ont du mal à boucler leurs fins de mois, il a affirmé que Etat et département avaient une responsabilité commune pour aider les Français à passer au mieux la crise actuelle avec inflation et défis énergétiques et climatiques.
Considérant que les Départements avaient saisi la main tendue par la Première ministre pour co-construire les politiques les concernant, soulignant qu’il considérait que cela nécessitait les moyens pour agir.
Reprenant des propos entendus de façon récurrente lors des tables rondes et dans les discours des groupes politiques, il a redit avec force que les Départements ne voulaient pas devenir les sous-traitants de l’Etat et il a réfuté ce
débat « insupportable, selon lequel l’État ferait mieux que nous pour assurer les missions qui nous sont confiées par la loi.
Abordant les aspects budgétaires il a dénoncé les discours prétendant que les Départements se portent bien, « je vous le dis tout net, NON, les Départements ne se portent pas bien ! Nous sommes en train de vivre une explosion de nos dépenses. Nous avons eu coup sur coup, la revalorisation de l’aide à domicile (qui était nécessaire) et l’extension du Ségur. Et puis nous avons eu l’augmentation du RSA, annoncée sans concertation : là encore, on a voulu faire croire à l’opinion qu’une hausse, ça se traduisait dans nos comptes par une baisse, parce qu’il y aurait moins de bénéficiaires… […] Nous sommes confrontés aussi, comme tout le pays, à l’inflation, au coût de l’énergie, de l’alimentation, des matières premières (30% d’augmentation sur nos couches de roulement et nous avons 378 000 km de routes à gérer), et nos Départements ont pris tout cela de plein fouet. J’ai fait chiffrer les dépenses nouvelles pour nos Départements : c’est 2 milliards et demi d’euros. La réalité, c’est que nous n’avons plus de marge, et que certains Départements ne peuvent plus faire face et ne savent pas comment ils vont boucler leur budget. »
Et il dit craindre un retournement de situation en ce qui concerne les DMTO, demande un filet de sécurité énergétique pour les Départements de France, comme prévu pour les communes les plus fragiles.
Et il met en garde sur deux « lignes rouges » :
Les contrats de Cahors auxquels il veut voir «se substitue un pacte d’Agen, fondé sur la confiance, et il n’y aura pas de confiance, sans engagement de l’État à nos côtés.»
Deuxième ligne rouge : « on ne peut pas nous demander une trajectoire budgétaire sur des dépenses obligatoires (RSA, PCH, APA). On ne peut pas nous demander d’accélérer avec des plans pauvreté, d’accélérer sur le retour à l’emploi, avec le pied sur le frein de la dépense… »
Il propose le remplacement de la CVAE par une part de TVA « avec des références qui nous permettent de bénéficier de la totalité de la dynamique de cette ressource »et que le fonds de transition énergétique, » soit territorialisé à l’échelle du Département. »
Il insiste sur la nécessité de moyens pour « notre système de sécurité civile »
Enfin il évoque l’« Agenda territorial » avec les Départements de France. » demandant que celui-là ouvre « la voie d’une nouvelle étape de décentralisation. »
Et d’insister sur « la concertation en amont des projets, le recueil systématique des initiatives de terrain, avant de décider. […] la révision des lois Notré et
MAPTAM, qui ont complexifié l’action publique dans des domaines qui sont essentiels : je pense aux mobilités, à l’eau […], et aux réseaux d’une façon très générale. Nous voulons une réflexion commune pour que les Départements soient reconnus vraiment comme chefs de file des politiques publiques qui leur ont été confiées, avec un pouvoir d’expérimentation et d’adaptation des normes. »
Il demande aussi que la question du reste à charge des AIS s’inscrive dans l’agenda territorial MAPTAM, qui ont complexifié l’action publique dans des domaines qui sont essentiels : je pense aux mobilités, à l’eau […], et aux réseaux d’une façon très générale. Nous voulons une réflexion commune pour que les Départements soient reconnus vraiment comme chefs de file des politiques publiques qui leur ont été confiées, avec un pouvoir d’expérimentation et d’adaptation des normes. »
Il demande aussi que la question du reste à charge des AIS s’inscrive dans l’agenda territorial
Elisabeth Borne, Première Ministre
La première ministre a tout d’abord voulu rassurer et séduire les Départements, rappelant qu’elle souhaitait travailler en confiance, la « main dans la main » avec les Départements et vantant le travail en commun.
Sur les aspects institutionnels, la Première ministre affirme vouloir « donner plus de liberté aux départements et aux collectivités», assurer une vraie différenciation, et assure vouloir mener ensemble une nouvelle étape pour une vraie décentralisation » avec une annonce après les élections sénatoriales.
Du côté annonces financières, elle a indiqué qu’elle ne se reconnaît pas dans ceux qui parle d’une bonne santé financière des Départements et annonce que:
« Le fonds vert de 1,5 milliard d’euros sera abondé de 300 à 500 millions d’euros. Et je vous annonce aujourd’hui que la moitié de cette enveloppe supplémentaire, soit environ 200 millions d’euros, sera donnée pour les seuls départements » que la mise en place d’ « un nouveau filet de sécurité [sera] mis en place pour 2023 » pour toutes les collectivités et que les AIS seront exclues de l’encadrement du fonctionnement.
Pour la CVAE, Elisabeth Borne a rappelé sa compensation sur la moyenne des années 2020/2023
A la fin des assises a été diffusé un document co-signé par Elisabeth Borne et François Sauvadet, détaillant « un programme de travail ambitieux.»
« Cet agenda de travail, qui sera engagé d’ici la fin d’année, illustre l’ambition des Départements et du Gouvernement de s’inscrire dans une démarche de co-construction des politiques publiques. Il a pour ambition de renouveler les rapports entre l’État et les collectivités, à partir d’un dialogue confiant et régulier, le plus en amont possible de la conception des réformes et du déploiement des politiques publiques.
[…] État et Départements souhaitent s’inspirer des actions de terrain pour gagner en inventivité, en efficacité, en pragmatisme, en prenant en considération ce qui existe dans les territoires, ce qui fonctionne, en préalable à l’élaboration des politiques publiques nationales.
[…] Le Département est le pilote des politiques publiques relevant de ses compétences sur son territoire. Il doit pouvoir assumer, en lien étroit avec les collectivités engagées dans ces politiques, un rôle de chef de file notamment pour répondre plus efficacement en matière de protection de l’enfance, du grand âge et du handicap, afin de mettre fin au fonctionnement en silo.
État et Départements se sont ainsi entendus pour faire converger leurs réflexions sur les conditions d’une meilleure expression des libertés locales via l’élargissement des possibilités d’expérimentation et d’adaptation des normes. Dans le même esprit, dans le prolongement de la loi 3DS, le bilan de la mise en œuvre des lois NoTRé et MAPTAM doit être réalisé pour en mesurer les conséquences sur le fonctionnement de l’organisation territoriale de la République.
La question des moyens mis à la disposition des Départements doit être au cœur du travail commun du Gouvernement et des Départements […] il est essentiel que les Départements puissent disposer de visibilité sur leurs moyens. Compte tenu de la spécificité des dépenses engagées par les Départements au titre de la solidarité, un travail prospectif sera entrepris afin d’identifier la dynamique de leurs recettes et de leurs dépenses et préserver leurs marges de manœuvre. État et Départements sont ainsi convenus de mener ce travail prospectif afin d’identifier comment les Départements peuvent retrouver des capacités à agir.
Les thèmes de l’agenda de travail en commun ont été définis en cohérence avec l’expertise et les domaines d’intervention des Départements : le recrutement et la fidélisation des métiers de la santé et du social, la protection de l’enfance, l’accès à la santé, le bien-vieillir, le handicap, la lutte contre la pauvreté, France travail et la Sécurité civile.